Lutte intégrée contre le feu bactérien de la pomme et de la poire

Publication : lundi 24 février 2014

Définition 

Le feu bactérien, causé par Erwinia amylovora, est une maladie bactérienne de la pomme, de la poire, de l'aubépine, de la pommette et des plantes ornementales de la famille des Rosacées. Il se manifeste par la perte des branches et affecte la structure de l'arbre. Dans les cas graves, quand la bactérie progresse dans le tronc ou le porte-greffe, l'arbre meurt. La gravité de la maladie dépend de la sensibilité du cultivar et du porte-greffe, de l'état de santé général de l'arbre, des pratiques culturales et des conditions du milieu. Les pertes économiques dues au feu bactérien découlent d'une diminution de l'étendue de la surface en fruits et de la mortalité des arbres. Le producteur doit parfois enlever les arbres et en replanter d'autres ou, dans les cas graves, remplacer des parcelles entières.

Les symptômes

Les symptômes du feu bactérien varient selon la partie de l'arbre atteinte. La brûlure des fleurs qui se manifeste sous la forme de grappes de fleurs noircies et ratatinées.

La brûlure des pousses qui se caractérise par une courbure en forme de crosse (ou de canne) typique.

Quand le feu bactérien atteint les plus grosses branches, on observe l'apparition dechancres sur le tronc et sur le porte-greffe. Le pourtour des chancres est généralement lisse au début, puis les bords se fendillent et ce phénomène devient de plus en plus prononcé avec le temps. L'infection est aussi repérée à cause de l'exsudat bactérien suintant à la surface des arbres infectés.

L'Agent responsable 

Les bactéries responsables du feu bactérien hivernent dans les chancres ou les sites d'attaque sur les arbres hôtes. Au printemps, elles se multiplient très rapidement, de sorte que la surface des chancres se recouvre d'un exsudat. Les insectes (p. ex. : mouches et abeilles domestiques) et les éclaboussures d'eau de pluie transportent les bactéries jusqu'aux fleurs. La pluie, une humidité relative élevée et/ou la rosée favorisent la propagation des bactéries vers le stigmate des fleurs et dans l'arbre. L'infection des fleurs se transmet souvent aux pousses plus tard au cours de la saison.

Comment  sauver les arbres une fois infectés par le feu bactérien?

Il n'y a pas de cure contre le feu bactérien; il est toutefois possible de limiter la propagation de la bactérie en appliquant de bonnes stratégies phytosanitaires dans le cadre d'un programme de lutte intégrée. Un tel programme devrait comprendre : une taille diligente des chancres en hiver; une taille durant la saison de croissance pour éliminer les symptômes dès leur apparition; la mise en oeuvre d'un programme de nutrition équilibré; le recours à des modèles de prévision pour déterminer le meilleur moment pour l'application des produits de lutte restreignant la dissémination de la maladie.

Actions de prophylaxies 

Aujourd'hui, la tendance va vers la plantation de vergers plus denses et l'utilisation de cultivars de grande valeur (dont un grand nombre sont très sensibles au feu bactérien), de sorte qu'il est difficile de prévenir la maladie. Il est toutefois possible de réduire les risques au minimum en choisissant soigneusement les cultivars et les porte-greffes au moment de la plantation de nouveaux vergers (la présente publication contient une liste précisant la sensibilité de quelques cultivars et porte-greffes courants). Les sites choisis pour les vergers devraient être bien drainés et le pH du sol devrait se situer entre 5,5 et 6,5. Le sol doit en outre contenir suffisamment de matière organique. Il faut éviter d'épandre trop d'azote. Il convient aussi de lancer un programme de lutte intégrée contre les insectes suceurs-piqueurs (p. ex. :cicadelles, pucerons, punaises). De plus, il est essentiel d'appliquer un programme de taille visant à éliminer le plus grand nombre possible de chancres. L'emploi de produits de lutte (cuivre ou bouillie bordelaise avant l'ouverture des boutons, streptomycine contre la brûlure des fleurs en combinaison avec un modèle de prévision permettant de déterminer le meilleur moment pour les applications sur les fleurs) aidera à freiner la propagation de la maladie. L'emploi d'ApogeeMDsur le arbres fruitiers adultes atteints de la brûlure des fleurs permet d'atténuer la sensibilité à la maladie. Étant donné les divers facteurs intervenant dans la lutte contre le feu bactérien, les stratégies de lutte intégrée deviennent cruciales.

Méthodes de lutte contre le feu bactérien au verger

Cette fiche de renseignements contient de l'information sur une gamme de pratiques diverses susceptibles d'aider à combattre le feu bactérien. Pour optimiser la lutte contre cette maladie, il faut recourir à une stratégie de lutte intégrée, qui tient compte de chaque facteur décrit.

1) Brûlure des fleurs

Figure 1 : Symptômes de la brûlure des fleurs sur une poire. Gracieuseté du ministère de l'Agriculture et des Terres de la Colombie-Britannique.

Figure 2 : Symptômes précoces de la brûlure des pousses et exsudat bactérien. Gracieuseté d'EarthTramper Consulting Inc.

2) Brûlure des pousses

Figure 3 : Symptômes de la brûlure des pousses - courbure en forme de crosse. Gracieuseté d'EarthTramper Consulting Inc.

Figure 4 : Symptômes de la brûlure des pousses sur une poire. Gracieuseté d'EarthTramper Consulting Inc.

3) Chancre

Figure 5 : Chancre sur le porte-greffe. Gracieuseté d'EarthTramper Consulting Inc.

Figure 6 : Chancre (pourtour lisse) sur une branche. Gracieuseté d'EarthTramper Consulting Inc.

Figure 7 : Chancre (pourtour fendillé) sur une branche. Gracieuseté d'EarthTramper Consulting Inc.

4) Infection de fruits

Figure 8 : Symptômes avancés de la brûlure des pousses sur une poire. Gracieuseté d'EarthTramper Consulting Inc.

Figure 9 : Symptômes avancés de la brûlure des pousses sur un jeune pommier. Gracieuseté d'EarthTramper Consulting Inc.

Choix du site

  • Il faut éviter les terres basses où se trouvent des poches de gelée et des sols argileux lourds.
  • Un bon drainage est essentiel. Il faut installer des drains en tuyaux.
  • Il importe d'éliminer les hôtes sauvages des haies et des vergers négligés de pommes ou de poires à proximité.
  • Il convient de faire analyser le sol avant la plantation (nutriments, pH, matière organique, nématodes) et de prendre les mesures qui s'imposent.

Choix des cultivars et des porte-greffes

  • Quand c'est possible, il faut choisir des cultivars et des porte-greffes résistant au feu bactérien.
  • Si cela est impossible à cause de la demande sur le marché, il importe alors de prendre d'autres mesures pour réduire les risques d'infection :
    • - Pour les jeunes arbres qui ne fructifient pas encore, il faut enlever les fleurs avant qu'elles n'ouvrent (par temps sec et en l'absence de risque de pluie au cours des 24 à 48 heures qui suivent).
    • - Pour les arbres qui fructifient, il faut enlever les fleurs secondaires tous les jours une fois que la floraison principale est terminée, si c'est possible (c-à-d. : vergers à forte densité).
  • Il vaut mieux éviter les porte-greffes sensibles , en particulier dans les régions géographiques où l'incidence annuelle du feu bactérien est élevée.
  • Il faut utiliser des porte-greffes résistants , lorsque c'est possible.

Gestion de la vigueur

  • Pour mettre en oeuvre un programme de nutrition équilibré, il faut faire analyser des échantillons de sol et de feuilles chaque année.
  • Il convient de ne pas fertiliser excessivement les arbres. L'azote excédentaire favorisera une croissance vigoureuse des pousses, ce qui rendra les arbres plus sensibles encore au feu bactérien, et ce, sur une période plus longue.
  • Afin d'atténuer les risques d'infection en fin de saison, il est préférable d'épandre les engrais en temps opportun pour éviter une croissance luxuriante pendant cette période.
  • Il faut aussi éviter de trop tailler, car cela déclenche une croissance excessive des pousses.

Manipulation manuelle des fruits et des pousses

  • Dans les vergers infectés par le feu bactérien, il faut éviter l'éclaircissage à la main, le pincement manuel des bourgeons et d'autres manipulations manuelles jusqu'après l'apparition du bourgeon terminal. (Cependant, le report de l'éclaircissage manuel peut entraîner une diminution du calibre des fruits, mais le risque de propagation de la brûlure l'emporte sur le désir d'obtenir des fruits plus gros).

Éclaircissage chimique à la floraison

  • Les pulvérisations d'éclaircissage des fleurs, qui provoquent la brûlure de l'apex du stigmate, sont bénéfiques. Elles préviendront probablement la croissance des bactéries et réduiront la quantité totale d'inoculum sur les fleurs dans la parcelle pendant quelques jours.

Abaissement de l'humidité dans le verger (microclimat)

  • Pour accroître la circulation de l'air et abaisser l'humidité, il est nécessaire de maintenir le gazon bien tondu, la croissance des mauvaises herbes au minimum et les arbres bien taillés.
  • Il faut éviter de recourir à l'aspersion en hauteur pendant la floraison, de même que lorsque les températures sont propices au feu bactérien.

Lutte intégrée contre les insectes

  • Il faut surveiller régulièrement les parcelles cultivées afin de dépister la présence des insectes suceurs (p. ex : pucerons, punaises et cicadelles), car ceux-ci disséminent la maladie.
  • Il importe donc d'appliquer de bonnes méthodes de lutte intégrée pour diminuer les populations d'insectes nuisibles.

Taille de dormance longue : assainissement du verger

L'enlèvement des chancres du feu bactérien pendant la dormance réduira le nombre et la distribution des sources d'inoculum primaire à l'origine des flambées subséquentes. La meilleure façon de procéder consiste à enlever et à brûler les parties infectées (chancres) chaque hiver. Il faut procéder ainsi avant la taille régulière pratiquée pendant la dormance.

  • Taille durant la saison de croissance

    La taille des tissus infectés durant la période végétative peut s'avérer extrêmement efficace, d'une part, en limitant le nombre et la distribution des chancres secondaires et l'infection des pousses et, d'autre part, en réduisant les risques de dommages graves en cas de chute de grêle et de forts vents durant l'été. L'idée de retirer du verger le bois contaminé par le feu bactérien pendant la période végétative est toutefois controversée. Certains experts conseillent de tailler le bois infecté dès l'apparition de symptômes, alors que d'autres recommandent plutôt de laisser les extrémités infectées se « cloisonner » et de les tailler durant la dormance.

    • Il faut envisager de tailler durant la période végétative quand :
      • les symptômes sont présents dans les parcelles de cultivars très sensibles;
      • les symptômes apparaissent sur de jeunes arbres qui ne fructifient pas encore et dans les jeunes plantations très denses;
      • les arbres poussent vigoureusement et le sol est très fertile;
      • le feu bactérien risque de se propager à des parcelles avoisinantes;
      • un voisin a dépisté le feu bactérien dans son verger.
    • Dépistage du feu bactérien
      • Dès la floraison, tous les trois à quatre jours, il importe de procéder au dépistage des fleurs infectées, ainsi que des chancres du feu bactérien qui n'ont pas été repérés au moment de la taille hivernale.
      • Après la chute des pétales, il faut poursuivre le dépistage de la brûlure des pousses jusqu'après l'apparition du bourgeon terminal.
      • Il faut se concentrer sur les parcelles de cultivars sensibles et celles qui ont déjà été infectées par le feu bactérien.

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